Inondations de mai-juin 2016 : le Loiret se souvient

01 juin 2021

Les Loirétains s'en souviennent encore. Le mardi 31 mai 2016, après des jours de pluie incessante, plusieurs phénomènes se conjuguent et provoquent des inondations exceptionnelles : plus de deux-tiers des communes du Loiret seront concernées...

Gidy vue du ciel, lors des inondations dans le Loiret en 2016

Gidy vue du ciel, lors des inondations dans le Loiret en 2016

Le mois de mai 2016 est le mois le plus pluvieux de toute l’histoire des relevés météo. En 72 heures, du dimanche 29 au lundi 30 mai, il tombe sur le Loiret 120 mm d’eau (l'équivalent de deux à trois mois de pluie), sur des sols déjà saturés d’eau.

Plusieurs phénomènes concomitants, à cinétique rapide, se produisent ainsi en même temps : crues et débordements fluviaux (Loing et Ouanne, Morchene, Dhuy, Cosson, Mauves, Essonne...) ; phénomènes karstiques ; débordement des canaux ; brèches dans les digues ; refoulement des réseaux, etc.

L’ensemble de ces événements provoque des inondations sur de nombreuses communes du territoire. 226 communes sont ainsi déclarées sinistrées dans le département du Loiret et 3 700 habitations directement touchées.

Les routes départementales sont particulièrement impactées : 137 des 326 routes départementales sont touchées. Des captages d’eau, des stations d’épurations, des bâtiments départementaux (archives, bâtiments sociaux, collèges - 28 sites, immeubles culturels, immeubles administratifs), de nombreuses entreprises et exploitations agricoles sont impactés.

« Je travaillais à l’époque à l’est de la métropole, raconte Mélanie. Dès que la rumeur a commencé à se propager dans l’entreprise, j’ai pris ma voiture pour retrouver mes enfants scolarisés à Chécy. Mais entre la tangentielle saturée et les routes impraticables car inondées, ça a été un véritable parcours du combattant pour couvrir les dix kilomètres qui me séparaient de l’école. Dès que j’arrivais à l’entrée d’une ville, je me trouvais face à une mare d’eau et je devais rebrousser chemin. Finalement, ce sont les pompiers qui m’ont orientée et m’ont fait passer par la levée de la Loire. Sincèrement, j’avais l’impression que c’était l’apocalypse. En effet, de là, j’avais une vue imprenable sur les jardins et les maisons inondées dont… la mienne… »

Activation de la cellule de crise

Le Département active immédiatement sa cellule de crise, sous l’autorité du président du Département et du directeur des services départementaux. Disposant de correspondants dans les différentes directions (routes, éducation, autonomie…), elle est chargée de la mise en œuvre opérationnelle des différents plans d’action et répond aux demandes de l’État en termes de mobilisation des moyens départementaux. Durant la période, ce sont ainsi près de 200 agents de toutes les directions qui ont été mobilisés en permanence, dont 140 pour la seule direction des Infrastructures. Ils réalisent des éditions régulières de bulletins d’état des routes et de cartographies (production de cinq à sept cartes par jour) afin d’apporter de l’information aux usagers de la route. Une page internet dédiée est créée loiret.fr/vigilance afin de donner des points de situation réguliers. Cette page est consultée plus de 250 000 fois en quelques jours. Sur les réseaux sociaux, 150 messages sont publiés sur Twitter. Ces tweets sont vus 1,7 million de fois. Deux posts journaliers, vus par près de 80 000 personnes, sont publiés sur Facebook. Les cinq agents du centre de contact téléphonique du Département reçoivent près de 3 000 appels sur la période. Sur le territoire, les services des agences territoriales barrent les routes rendues impraticables et mettent en œuvre des actions de pompage pour évacuer l’eau sur certaines sections stratégiques. Ils effectuent également un patrouillage sur le réseau afin d’identifier les dommages pour déjà prévoir d’y remédier en vue d’un retour à la normale le plus rapide possible.

De son côté, le Service départemental d’Incendie et de Secours du Loiret (Sdis 45) engage environ 200 sapeurs-pompiers par jour auxquels viennent s’ajouter les moyens de l’Unité d'instruction et d'intervention de la sécurité civile, de la Mission d’appui de la sécurité civile, de l’Établissement de soutien opérationnel et logistique ainsi que ceux des Sdis de la Loire-Atlantique et des Pays de la Loire venus prêter main forte à leurs collègues du Loiret ainsi que les équipements de pompage de la Force d’action rapide nucléaire de la centrale de Dampierre-en-Burly. Le SDIS 45 réalise plus de 4 000 interventions entre le lundi 31 mai et le samedi 4 juin et évacue au total 917 personnes.

Marie-Ève a eu la chance d’avoir « une maison un peu plus en hauteur que les autres », de sorte que "seuls" sa cave et son jardin ont été inondés. « 1,80 m d’eau dans le jardin ! On y a  trouvé une carpe qu’on a rejeté dans le canal ! On venait d’emménager et il y avait encore des cartons non déballés dans la cave. Entre ça et le compteur électrique, le ballon d’eau chaude, le congélateur, le lave-linge, le sèche-linge, on n'a pas pu retourner vivre dans leur maison pendant plusieurs semaines et on a été hébergé par des proches. Mais il n’y a pas eu de drame humain, on a pu aller chercher notre chat au bout de cinq jours et elle allait bien. »
Marie-Ève se souvient surtout de l’après-inondation, « de la déchetterie à ciel ouvert, des containers dans lesquels on déposait les appareils électro-ménagers et les meubles mais surtout, surtout, de la grande solidarité entre les habitants, des instituteurs de l'école qui sont venus nous aider, des gens du quartier que je ne connaissais même pas qui nous ont prêté main forte... »

L’engagement du Département pour la reconstruction

Le Département finance à hauteur de 5 millions d’euros des réparations de dommages sur les routes, les ponts, les mobiliers extérieurs des parcs départementaux, etc. À la suite de ce phénomène, il procède à l’inspection de plus de 900 ouvrages.

De nombreux travaux sont entrepris en urgence afin de sécuriser le patrimoine et assurer la continuité du réseau routier. Des opérations sont menées pour procéder au débouchage des aqueducs latéraux des écluses de Donnery et Mardié, à la réfection du passage inférieur de la RD 2060 à Donnery, ainsi qu’à la remise en état de la passerelle du déversoir de l’écluse de la Folie.

En plus de ces interventions, en 2016, des travaux de réfection sont menés sur 26 ouvrages pour un montant de près d’1,3 million d’euros.

De façon complémentaire, des opérations de réparation plus conséquentes sont réalisées afin de reconstruire un tronçon de la de la RD 831 emportée par les flots sur la commune d’Orville (87 000 € TTC) ainsi qu’un ouvrage sur la RD 64 à Marcilly-en-Villette qui s’est effondré. Il est reconstruit entre septembre et décembre 2016 pour un montant de 360 000 € TTC.

Aide aux communes et aux sinistrés

Le Département met en place des dispositifs d’aides volontaristes à hauteur de 2,8 M € en faveur des sinistrés et des collectivités.
La collectivité débloque un fond d’urgence de 800 000 € en direction des populations sinistrées. 500 000 € sont versés immédiatement aux foyers touchés. À ce fond d’urgence sont ajoutés 2 millions d’euros à destination des collectivités. Dans le cadre de sa mission de solidarité territoriale, le Département décide de créer deux types d’aides, en plus des dispositifs déjà existants :
- 1 M€ de subvention pour aider à la réparation des dégâts qui n’ont pas été pris en charge par les assurances (voirie et réseaux notamment) en complément de la dotation de solidarité venant de l’État ;
- 1 M€ sous forme d’avance remboursable à taux zéro pour permettre aux collectivités de financer les travaux de remise en état des biens assurables.

Maîtrise du patrimoine départemental routier

Dans le cadre de son activité, les services de la direction des Infrastructures procèdent à une surveillance annuelle des ouvrages d’art (ponts…) situés sur le domaine public routier départemental. En plus de ces visites de contrôle, des inspections détaillées sont réalisées de façon régulière par un prestataire extérieur spécialisé. Ce double contrôle permet d’établir un programme annuel d’intervention sur les ouvrages d’art. En 2021, c’est près de 2 millions d’euros qui ont été consacrés à l’entretien de ces ouvrages.

Maîtrise du risque sur la Loire : faire face aux situations d’urgence

Pour faire face aux situations d'urgence (inondation, accident industriel, tempête exceptionnelle…), plusieurs plans d'urgence départementaux ont été élaborés. Ils comportent les procédures à mettre en œuvre : mesures de protection des biens et des personnes, organisation des secours, déviations routières, information des populations… Pour tester la validité de ces plans et les améliorer, plusieurs exercices de crise sont organisés chaque année. Le Conseil départemental, qui a mis en place une organisation lui permettant de mobiliser l'ensemble de ses services en cas de crise majeure, en est partie prenante au côté des services de l'État.
Dans le Loiret, les crues de la Loire constituent un risque auquel sont exposés les habitants et le patrimoine bâti. Dans le cadre du plan d'urgence spécifique inondations, le Conseil départemental a élaboré un plan de continuité du service public lors d'une crue majeure de la Loire. 
Dans le cadre de l’élaboration de ce plan, des cartes de submersion ont été réalisées par les services de l’État afin d’identifier les zones à neutraliser en fonction de l’évolution du phénomène d’inondation.
Ainsi les possibilités de franchissement de la Loire ont été identifiées selon des périodes de retour de crues. Celles-ci fluctuent en fonction de la dimension des événements.

Usage des ponts du Loiret en fonction de la période de retour de la crue

Si l'actuel pont de Jargeau est potentiellement encore franchissable au cours d’une crue bicentennale, il n’est qu’ouvert qu’aux services de secours ou fondamentaux. Lors d’une crue semi-millénale, ce pont n’est plus franchissable. En revanche, l’ouvrage de franchissement de la Loire qui va être mis en œuvre par le Département dans le cadre de la déviation de Jargeau aura une période de retour de crues semi-millénale. Il sera ainsi l’ouvrage de franchissement avec le plus long retour de crue du Département.

En cas de crue de la Loire, les itinéraires de déviation sont établis au plus près du phénomène afin d’orienter les usagers vers les possibilités de franchissement encore disponibles. Les déviations sont adaptées au fur et à mesure des évolutions de l’événement.

Prévention du risque inondation

En 2018, le Département rachète le canal d’Orléans à l’État. S’il a pour objectif d’en faire un outil de développement touristique, il envisage aussi par ce rachat de maîtriser en direct les risques liés au débordement du canal et de pouvoir intervenir par anticipation sur l’ouvrage.

Un nouveau système d’alerte est opérationnel depuis le printemps 2020.
21 nouveaux capteurs de niveau d’eau ont été installés : sept sur le canal, dont six sur le versant Loire et un au point de partage à Châtenoy ; un sur le Cens au Gué Morin à Mardié et treize sur les étangs.
Un module de prévision a été développé. Il permet d’anticiper la prévision de débordement du canal. La modélisation calcule la saturation en eau des sols par analyse des données météo et en déduit la quantité de pluie susceptible de faire déborder le canal. En cas de risque, une pré-alerte ou une alerte est déclenchée par les services du Département et un module de prévision des hauteurs d’eau aux différentes stations du canal est mis en route. Le Conseil départemental déclenche alors les procédures de manœuvres hydrauliques qui s’imposent et une information large à l’attention des communes et autres acteurs de la sécurité publique.

Le Département restaure sept écluses et y installe des clapets anti-crue, comme par exemple à Vitry-aux-Loges, Combleux (Embouchure et La Patache), Donnery et Mardié, Châlette-sur-Loing (La Folie) et Pannes (Sainte-Catherine).

Un clapet anti-crue, qu’est-ce que c’est ?

Principe de fonctionnement d'un clapet anti-crue

 

Les études ont montré que le curage des biefs pouvait avoir un effet sur la maîtrise de la ligne d’eau en crue du canal. Le curage du bief de Donnery a par exemple permis d’extraire 18 000 m3 de sédiments du canal.

« Aujourd’hui, quand il pleut, j’y repense, avoue Marie-Ève. Avec les travaux qui ont été menés, on va dire que j’ai un peu plus confiance. Et, puis, maintenant, je sais. C’est arrivé une fois, ça pourra recommencer. J'espère que l'on saura repérer les signes et anticiper. »

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