Petit Pierre, un grand nom à graver dans la roche du Loiret

09 février 2024

Originaire de Vienne-en-Val, Pierre Avezard (1909-1992), dit Petit Pierre, naît sérieusement handicapé mais attendrit à l’international par son art brut alors qu'il demeure presque inconnu dans son propre département. Le Loiret lui consacre une exposition, Art brut & Handicap, du 12 au 23 février.

Petit Pierre manège

Ici, on ignore jusqu’à même son existence, à 10 000 kilomètres, on l’expose. « Je me chagrine de l'absence d'hommage à Petit Pierre sur ses terres de vie, Vienne-en-Val, Saint-Denis-de-l'Hôtel, Fay-aux-Loges et Jargeau, alors que l’on lui a consacré une exposition à Taïwan ou des pièces de théâtre au Canada ou au Mexique », s’offense Jean-François Raffestin. Au détour d’un article de La République du Centre en 2020, le retraité actif découvre l’histoire de Pierre Avezard, dit Petit Pierre. « Coup de cœur immédiat au point de créer un club éponyme pour sa valorisation locale. »

Petit Pierre ? Ce nom vous échappe ? « Apprenez que son histoire commence plus tôt que prévu, en décembre 1909. Arrivé prématurément au monde à Vienne-en-Val, l’infortune du syndrome Treacher Collins le fait sourd-muet, borgne et lui ôte une partie du palais, narre Jean-François Raffestin. L’école, il n’y reste qu’un an, la faute aux moqueries et autres harcèlements que l’on imagine qu’à moitié… » Voilà que naît à son tour la passion du conteur. Durant toute sa modeste vie de garçon vacher qu’il mène dès ses huit ans dans les communes environnantes, Petit Pierre montre des talents d’observation et de bricolage. « Il récupère des pneus, des chambres à air, du fil de fer, tout ce qu’il trouve. Il en sort de l’art brut, créant des personnages, des animaux et même des monuments. Une Tour Eiffel de 23 mètres ou le Moulin-Rouge ! » Mais, une œuvre parmi toutes les autres l’ouvre à la notoriété : le manège de Petit Pierre.

Le manège de Petit Pierre

Petite merveille d’ingénierie, il rassemble quelques-unes de ses créations en un système de courroies actionné par un moteur électrique, le tout pilotable. Cet art brut attire des centaines de personnes chaque week-end aux abords de sa ferme à Fay-aux-Loges. Jusqu’à même toucher des artistes parisiens qui lui consacrent une exposition photographique au musée d’art moderne de la capitale en 1978. Deux ans plus tard, le film documentaire Petit Pierre d’Emmanuel Clot dessinant sa vie remporte le César du meilleur court-métrage documentaire. Sortent ensuite des reportages pour la télévision, la radio ou la presse écrite, dont le fameux New York Times, avant des pièces de théâtre dans les années 2000 en Espagne, au Mexique, ou à Taïwan. Le tout, sans oublier des livres en librairies ou un personnage inspiré de son histoire dans la comédie film Micmacs à tire-larigot de Jean-Pierre Jeunet de 2009. Finalement, Pierre Avezard anime son manège jusqu’en 1983, à 74 ans, et, ce, même le dimanche venu de la maison de retraite de Jargeau aujourd’hui éponyme. En 1989, le musée privé d’art hors normes mais ouvert au public La Fabuloserie, à Charny dans l’Yonne, récupère le manège et continue encore de nos jours à le faire tourner pour ses 15 000 visiteurs annuels. Petit Pierre, lui, s’éteint en 1992 à l’âge de 82 ans.

Petit Pierre

Jean-François Raffestin a minutieusement épluché la vie de Petit Pierre deux ans durant. Il a fouillé sa maison laissée à l’abandon, contacté sa famille (neveux, nièces), récupéré des créations « dont certaines, comme une fleur en fer ou un petit train, se sont vendues à prix d’or, 40 000 et 50 000 euros ». Il a même convaincu la maire de Jargeau, Sophie Héron, d’apposer une plaque commémorative à l’entrée du cimetière communal ou la ville de Fay-aux-Loges de nommer Pierre Avezard l’une de ses futures rues.

 


Infos pratiques :

  • Exposition gratuite Art brut & Handicap, du 12 au 23 février, à l'Hôtel du Département, du lundi au vendredi, de 8 h à 17 h 30.
  • Écrivez à contact@petitpierre.club pour de plus amples détails sur Pierre Avezard.

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